Imaginez un instant : un matin de décembre 1963, quelque part dans les bureaux de Citroën, un homme fait apporter l'avant complet d'une DS dans son atelier. Armé d'un simple marteau, de plasticine et de plexiglas, il va littéralement détruire et reconstruire en quelques heures le capot, les pare-chocs et les ailes de la voiture, créant au passage le fameux "nez de requin" qui deviendra l'une des signatures les plus reconnaissables de l'automobile française.
Cet homme, c'est Flaminio Bertoni, et cette anecdote résume à elle seule le génie d'un type qui n'était pas vraiment un designer automobile classique, mais bien un sculpteur. Un artiste qui a révolutionné l'automobile en traitant chaque voiture comme une œuvre d'art.
Parce que voyez-vous, quand on parle de design automobile français, on pense tout de suite aux lignes iconiques de la DS ou au charme irrésistible de la 2CV. Mais ces chefs-d'œuvre, on les doit à un Italien qui n'avait jamais prévu de dessiner des voitures et qui pourtant va révolutionner à jamais la façon dont on conçoit l'automobile.
Les premiers coups de ciseau d'un futur génie
On est le 10 janvier 1903 à Masnago, près de Varèse en Lombardie. Flaminio Bertoni voit le jour dans une famille modeste, mais très vite, le gamin montre des dispositions hors normes pour les arts plastiques. Je vous jure, ce type sculptait déjà quand d'autres gamins jouaient encore aux billes. Son maître Giuseppe Talamoni le forme aux techniques du modelage et de la sculpture, et à 18 ans, notre futur génie intègre la carrosserie Macchi.
Mais là où ça devient intéressant, c'est en 1922. Une délégation française débarque chez Macchi et tombe complètement sous le charme du travail de Bertoni. Imaginez la scène : des Français qui viennent en Italie et qui repartent avec un coup de cœur pour un jeune sculpteur de 19 ans. C'est exactement ce qui va changer le cours de l'histoire automobile.
En 1923, direction la France pour un voyage d'études qui va durer huit ans. Huit ans pendant lesquels Bertoni va absorber le savoir-faire français en passant successivement chez les carrossiers Felbert, Manessius et Rothschild. Et c'est là, au détour d'un atelier parisien, qu'il fait la rencontre de Lucien Rosengart, ami d'André Citroën. Le destin vient de se mettre en marche.
L'entrée chez Citroën : quand l'art rencontre l'industrie
Juin 1932. Flaminio Bertoni pousse pour la première fois les portes de Citroën. André Citroën, le patron, a besoin d'un designer pour un projet révolutionnaire : une voiture à traction avant. Le problème, c'est que personne ne sait vraiment à quoi ça doit ressembler. Les ingénieurs ont résolu les problèmes techniques, mais pour les lignes, c'est le flou artistique total.
Alors Bertoni fait ce qu'il sait faire de mieux : il sculpte. Pas un dessin, pas un plan technique, une sculpture. Il présente son travail à André Citroën et à son épouse, et là, c'est le coup de foudre immédiat. Cette sculpture, c'est l'ADN de ce qui deviendra la Traction Avant, présentée en avril 1934.
Et vous savez quoi ? Cette voiture va révolutionner l'automobile européenne. Parce que Bertoni n'a pas dessiné une voiture, il a sculpté une forme pure. Fini les angles droits et les lignes biscornues des automobiles de l'époque, place aux courbes harmonieuses qui épousent naturellement l'aérodynamisme.
La transformation de la 2CV : donner une âme à l'utilitaire
Mais l'histoire la plus dingue de Bertoni, c'est peut-être celle de la 2CV. En 1935, Pierre-Jules Boulanger, le patron de Citroën, lance un projet fou : créer une voiture pour transporter "un fermier en sabots avec 50 kg de pommes de terre ou un panier d'œufs à travers un champ labouré". Le cahier des charges de la TPV - Très Petite Voiture - est d'un pragmatisme absolu : pas cher, robuste, économique.
En 1939, les ingénieurs sortent leur prototype. Et là, c'est le drame : la TPV est d'une laideur absolue. Tellement moche que même Boulanger en a des sueurs froides. Comment vendre ça au grand public ? C'est là qu'on fait appel à Bertoni avec une mission impossible : donner "un minimum de dignité esthétique" à ce truc.
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Et là, Bertoni va réaliser un miracle. Avec ses méthodes de sculpteur, il va transformer cette voiture utilitaire en icône. Les phares ronds qui lui donnent un air sympathique, cette calandre ondulée qui lui confère un sourire permanent, ces ailes bombées qui lui donnent du caractère... Bertoni n'a pas redessiné la 2CV, il lui a donné une personnalité.
L'influence inattendue d'une moto BMW
D'ailleurs, petite anecdote croustillante que j'adore : le fameux moteur bicylindre refroidi par air de la 2CV ? Il s'inspire directement du moteur de la moto BMW personnelle de Bertoni. Vous imaginez ? Le type dessine les lignes de la voiture ET influence sans le vouloir la conception du moteur parce qu'il se balade à moto le weekend !
Mais l'histoire de Bertoni pendant la guerre, c'est du grand n'importe quoi. En 1940, il se fait arrêter pour avoir refusé de signer un acte d'allégeance à la France - il ne voulait pas renier ses origines italiennes. En 1944, re-arrestation, mais cette fois-ci pour collaboration avec les Français ! Le pauvre s'est fait arrêter deux fois pour des raisons complètement opposées. C'est dire si les temps étaient confus.
Et pourtant, malgré ces turbulences, la 2CV sortira enfin en 1948 et deviendra immédiatement l'une des voitures les plus aimées de France. Grâce au coup de patte de Bertoni, cette voiture de ferme s'est transformée en compagne de route de toute une génération.
La DS : quand Bertoni sculpte l'automobile du futur
Mais le chef-d'œuvre absolu de Bertoni, sa Joconde à lui, c'est évidemment la DS. En 1955, au Salon de Paris, Citroën dévoile cette voiture venue du futur et c'est littéralement l'explosion. Les visiteurs n'en croient pas leurs yeux.
Cette fois-ci, Bertoni travaille en duo avec l'ingénieur André Lefebvre, et leur collaboration va accoucher d'un monstre d'innovation. Lefebvre s'occupe de la technique révolutionnaire - suspension hydropneumatique, direction assistée, freins à disque - pendant que Bertoni sculpte des lignes qui semblent sorties d'un film de science-fiction.
Et vous savez d'où vient l'inspiration de la DS ? D'une forme de poisson que Bertoni avait sculptée dans un bloc de plâtre ! Ce type regardait un poisson et y voyait l'automobile de demain. C'est ça, le génie artistique.
Un raccourcissement d'urgence qui devient iconique
Mais attention, parce que l'histoire de la DS, c'est aussi une belle improvisation. La première version faisait presque six mètres de long - bien trop pour les garages français de l'époque. Qu'est-ce qu'il fait, Bertoni ? Il raccourcit la voiture d'un mètre en urgence et masque la coupe avec ces fameux cônes en plastique qui abritent les clignotants arrière.
Cette adaptation de dernière minute ? Elle est devenue l'un des éléments de design les plus reconnaissables de la DS ! C'est ça aussi, le génie : transformer une contrainte technique en signature esthétique.
La Renault 5 était bien plus qu'une simple voiture populaire - c'était un symbole de liberté et d'indépendance pour toute une génération de Français. Quand elle est sortie en 1972, personne n'imaginait qu'elle deviendrait l'une des voitures les plus emblématiques de l'Hexagone.
Et vous savez quoi ? Cette époque dorée de l'automobile française, elle me rappelle pourquoi j'adore les miniatures automobiles. Parce que tenir une petite DS au 1/43ème dans ses mains, c'est un peu comme retrouver toute cette créativité d'un coup.
C'est d'ailleurs pour ça que j'ai ouvert ma boutique BernardMiniatures.fr. J'ai plus de 1500 miniatures en stock, surtout du 1/43ème, avec un focus sur les voitures anciennes de 1950 à 1999. Bon, je ne suis pas un gros site, alors souvent j'ai qu'une ou deux pièces de chaque modèle, mais c'est aussi ce qui fait le charme. J'ai des Citroën bien sûr - quelques DS et 2CV magnifiques - mais aussi des Renault, des Peugeot, des modèles des années 60-70-80...
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Maintenant, revenons à notre sculpteur génial et à sa méthode de travail pas comme les autres...
La méthode Bertoni : sculpter plutôt que dessiner
Ce qui rend Bertoni unique, c'est sa méthode de travail. Là où tous les designers de l'époque dessinaient sur papier, lui, il sculpte. Il pense en trois dimensions, il palpe la matière, il ressent les volumes. C'est pour ça que ses voitures ont cette fluidité, cette harmonie qu'on ne retrouve nulle part ailleurs.
Henri Dargent, qui fut son assistant de 1957 à 1964, raconte que Bertoni passait des heures à modeler l'argile, à chercher la courbe parfaite. "Il ne dessinait pas une voiture, il la faisait naître de ses mains", témoignait-il. Cette approche sculpturale explique pourquoi les Citroën de Bertoni ont vieilli avec tant d'élégance.
Et cette méthode, elle va influencer toute une génération de designers. Robert Opron, qui lui succédera après sa mort, gardera cette philosophie du volume et de la sculpture. On la retrouvera dans la CX, la GS, toutes ces Citroën qui portent encore aujourd'hui l'ADN de Bertoni.
Le nez de requin : improvisation géniale ou méthode établie ?
Cette anecdote du "nez de requin" de décembre 1963, elle résume parfaitement l'homme. Un samedi matin, avec un marteau et quelques outils de fortune, Bertoni révolutionne le design de la DS. Cette violence créatrice, cette capacité à détruire pour mieux reconstruire, c'est tout à fait lui.
Et le résultat ? Un avant-goût de ce que sera l'automobile des années 70. Ce nez de requin influence déjà les lignes de la future CX. Bertoni ne le sait pas encore, mais il vient de dessiner l'avenir de Citroën.
Malheureusement, il ne verra jamais cet avenir se concrétiser.
La fin brutale d'un génie en plein vol
7 février 1964. Flaminio Bertoni s'effondre dans son bureau. Une crise cardiaque l'emporte à 61 ans, alors qu'il planche sur les lignes d'un futur coupé DS. Le maître italien s'éteint littéralement au travail, sculptant jusqu'à la fin les formes automobiles qui ont révolutionné le design du XXe siècle.
Ce coupé DS inachevé, on ne le verra jamais. Mais quelle aurait été sa gueule ? Connaissant Bertoni, il aurait probablement encore repoussé les limites, encore surpris le monde entier.
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Sa disparition laisse un vide énorme chez Citroën. Comment remplacer un type pareil ? Comment continuer à faire du Bertoni sans Bertoni ? Robert Opron essaiera, avec talent d'ailleurs, mais l'âme de la marque ne sera plus jamais tout à fait la même.
L'héritage éternel d'un sculpteur automobile
Aujourd'hui, plus de 60 ans après la présentation de la DS, les lignes de Bertoni font encore rêver. Cette voiture a été élue plus belle voiture de tous les temps par de nombreux magazines spécialisés. La "Joconde de l'automobile", comme on l'appelle parfois.
Et la 2CV ? Elle aura produit plus de 5 millions d'exemplaires avant son arrêt définitif en 1990. Cinquante-deux ans de carrière pour une voiture qui était censée être juste utilitaire. C'est ça, le pouvoir de Bertoni : transformer l'utile en beau, le fonctionnel en émotionnel.
Parce que voyez-vous, Flaminio Bertoni n'a pas juste dessiné des voitures. Il a sculpté des émotions. Chaque courbe de ses créations raconte une histoire, chaque ligne exprime un sentiment. Quand on regarde une DS, on ne voit pas juste une voiture des années 50, on voit l'optimisme de toute une époque qui croyait en l'avenir.
Et quand on croise une 2CV qui pétarade joyeusement sur une route de campagne, on ressent immédiatement cette simplicité heureuse, cette joie de vivre que Bertoni avait su insuffler à une simple "voiture de fermier".
Le génie italien qui a révolutionné l'automobile française
Au final, l'histoire de Flaminio Bertoni, c'est celle d'un homme qui a révolutionné tout un art sans même s'en rendre compte. Parti d'Italie avec ses outils de sculpteur, il a fini par redéfinir ce que pouvait être une automobile.
Avant lui, on construisait des voitures. Après lui, on a sculpté des rêves. La DS et la 2CV ne sont pas juste des moyens de transport, ce sont des œuvres d'art roulantes qui continuent, des décennies plus tard, à faire battre le cœur des passionnés.
Et cette leçon de Bertoni, elle résonne encore aujourd'hui. Dans un monde où l'automobile devient de plus en plus technique, de plus en plus digitale, l'émotion reste l'élément clé. Une voiture sans âme, c'est juste une machine. Avec de l'âme, ça devient un compagnon de route.
Flaminio Bertoni l'avait compris il y a 70 ans. Il sculptait des voitures comme on sculpte des statues : pour l'éternité. Et force est de constater qu'il a réussi son pari. Ses créations traversent les générations sans prendre une ride, preuve que le beau, le vrai beau, ne vieillit jamais.
Voilà pourquoi Flaminio Bertoni restera à jamais le sculpteur de nos plus beaux rêves automobiles.














